L'Atelier

LA TRANSMISSIONÀ VARIATION CONTINUE

Publié le 10 février 2019 - MICHEL GARNEAU

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Toutes les motoneiges modernes, sans exception, font appel à une transmission à variation continue (TVC) comme système d’entraînement. À la fois simple et compliquée, celle-ci fournit la polyvalence nécessaire à un véhicule appelé à fonctionner dans une grande variété de conditions et de vocations. Combinée avec la convivialité typique d’un tel système, cette même caractéristique fait en sorte qu’elles sont maintenant de rigueur dans les scooters, tout comme les motoquads et autoquads. D’ailleurs, depuis quelques années, nous constatons même un nombre toujours croissant d’automobiles dotées de ce type de transmission. Alors, puisque ce système est semblablement indissociable de notre loisir favori et destiné à une utilisation plus répandue dans d’autres domaines, le moment est bien choisi pour examiner son fonctionnement.

Le rôle du système d'entraînement

Avant d’aborder ce qu’est spécifiquement une TVC, commençons avec un survol de la fonction de base du système d’entraînement d’une motoneige. La portion évidente de la réponse est simple, l’idée étant de transmettre la puissance du moteur à la chenille. Tournons-nous à présent vers la portion moins évidente, soit celle d’assurer que le lien mécanique créé entre le moteur et la chenille soit toujours optimisé. Bref, il s’agit de voir à ce que le rapport de démultiplication entre le moteur et la chenille équilibre le mieux possible la puissance du moteur et la charge créée par la chenille, et ce, de sorte à permettre de maximiser la performance tout en minimisant la consommation d’essence.

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Qu'est-ce qu'une TVC?

Alors, qu’est-ce qu’une TVC au juste? Celle-ci, connue aussi sous l’acronyme CVT (soit une abréviation de l’expression anglaise Continuously Variable Transmission), est une transmission automatique dépourvue d'engrenages, étant plutôt dotée d’une courroie (dans le cas d'une motoneige; certaines applications, par exemple les automobiles, utilisent plutôt une chaîne) et de poulies pour transmettre la puissance. Ce qui la rend unique est sa capacité à faire varier continuellement le rapport de démultiplication. Autrement dit, elle propose l'équivalent d'un nombre infini de rapports, ce qui la distingue des boîtes de vitesses conventionnelles qui, elles, offrent une sélection de rapports de démultiplication fixes et prédéfinis.

La rapidité et la fluidité avec laquelle une TVC change de rapport sans créer de temps mort (comme c'est le cas avec une boîte à vitesse conventionnelle) la rend idéale pour une vocation motoneige. Par exemple, dans des situations de grande trainée (disons dans la neige poudreuse) où une interruption même momentanée du transfert de couple pourrait être suffisante pour produire un embourbement du moteur, la puissance ne cesse jamais d'être transmise malgré un changement de rapport effectué par la TVC. Dans les faits, la TVC permet de garder la vitesse du moteur à l’intérieur d’une plage de révolutions où celui-ci fournit son meilleur rendement.

Un système idéal pour une motoneige

Comme nous le savons tous, le milieu dans lequel une motoneige est appelée à fonctionner est on ne peut plus variable et dynamique. Par exemple, un motoneigiste peut dans un instant circuler à vitesse égale dans un sentier, soit dans des conditions à faible trainée, et deux secondes plus tard, se retrouver immergé dans la poudreuse, la motoneige peinant à garder son élan en raison de la résistance accrue qu’impose la neige. Il va de soi qu’en fonction de ces deux scénarios, la charge sur le moteur est très différente et la réalité est que le maintien de l’équilibre dans ces conditions si variées et changeantes constitue un défi de taille. Heureusement pour nous, motoneigistes, la TVC excelle dans l’exécution de cette tâche, des embrayages bien calibrés permettant de passer harmonieusement d’un rapport à un autre en un rien de temps et sans jamais surcharger le moteur. Comment accomplit-elle cette tâche? De façon simpliste, une TVC de motoneige travaille à équilibrer la vitesse du moteur à la charge éprouvée à l’endroit de la chenille. Pour ce faire, on fait appel à une poulie motrice qui est sensible à la vitesse et une poulie menée qui est sensible au couple (ou à la résistance, si vous voulez), les deux travaillant de concert pour établir un équilibre (en fonction des contraintes de la calibration, bien sûr) à tout moment et en toutes circonstances.

On accélère

La poulie motrice (aussi connue sous le nom de poulie primaire) fait appel à une combinaison d’un ressort et de masselottes pour gérer son fonctionnement. Plus précisément, le ressort applique une force qui sépare les deux assiettes, ce qui fait en sorte que celles-ci soient éloignées l’une de l’autre lorsque le moteur est arrêté ou roule à basse vitesse. Les masselottes (généralement en nombre de trois) sont ancrées sur un bras de pivot à une extrémité. Lorsque le moteur est en marche et que les révolutions augmentent, l’effet centrifuge entraîne les masselottes à pivoter et se déplacer pour exercer une force contre les rouleaux montés à même la portion mobile de l’embrayage. Aucun déplacement ou mouvement n’aura lieu tant et aussi longtemps que la force exercée par les masselottes n’excèdera pas la force du ressort. La force produite par les masselottes augmentant en fonction de la vitesse de rotation, celle-ci atteint et surpasse éventuellement la force du ressort, entraînant un mouvement de la soucoupe mobile en direction de la soucoupe fixe.

Ceci a pour effet de « pincer » la courroie, la forçant à tourner et lançant le processus de transfert de puissance du moteur à la poulie secondaire. Au fur et à mesure que la vitesse du moteur continue à grimper, la force exercée par les masselottes augmente davantage, entraînant plus de mouvement dans la soucoupe mobile et, par ricochet, dans la courroie. Lorsque la courroie est entrainée par la poulie motrice, elle doit forcément tourner autour d’une plus grande circonférence. Étant de longueur fixe (et de construction très robuste), elle ne peut s'allonger de façon significative; elle doit donc compenser en raccourcissant la circonférence à laquelle elle est soumise à son autre extrémité, soit dans la poulie menée. Cette dernière est également composée de deux assiettes et d’un ressort, ce dernier servant à garder les deux soucoupes ensemble, ou collées l’une contre l’autre. Ainsi, la courroie transmet la pression à même les deux assiettes de la poulie menée, ce qui a pour effet de tenter de les séparer (réduisant ainsi la circonférence et fournissant à la courroie l’espace dont elle a besoin). Pour y arriver, toutefois, elle doit contrer la force appliquée par le ressort. Une fois que la force exercée sur les assiettes par la courroie devient supérieure à celle du ressort, les soucoupes commencent à se séparer et le tour est joué.

Au fur et à mesure que les régimes du moteur continuent à grimper, la force qui cherche à rapprocher les assiettes dans la poulie motrice augmente, entraînant à son tour la courroie à séparer davantage les assiettes de la poulie menée. Ces changements de circonférence des deux poulies ont pour effet de changer le rapport de démultiplication. Tout se poursuit ainsi alors que la vitesse du moteur continue à grimper, soit jusqu'à ce que la poulie atteigne sa fermeture maximale, après quoi un équilibre est atteint. La plage de rapports réalisée par une TVC de motoneige typique varie de 3:1 (soit 3 révolutions de la poulie motrice/moteur pour chaque révolution de la poulie menée) à 1:1 à pleine vitesse (indiquant que les deux poulies tournent à la même vitesse).

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Les circuits de course snocross exposent une des lacunes associées à l'utilisation d'un système TVC dans les motoneiges. Plus précisément, lorsque la motoneige fait un saut et que la chenille quitte le sol, la diminution soudaine de résistance pousse la poulie menée à diminuer la démultiplication. Une fois que la chenille touche la neige et que le pilote tente d'accélérer, il rencontre un léger décalage alors que les poulies doivent s'ajuster à la nouvelle réalité, soit la résistance subitement réintroduite dans le système. Pour contrer cette tendance, certains pilotes laissent traîner le frein, diminuant ou empêchant la diminution de démultiplication, réduisant ainsi le décalage à l’atterrissage et permettant à l'accélération de reprendre plus rapidement. Notez comment le rotor de frein (devant la botte du pilote) est luisant dans la photo, preuve qu’il est sévèrement sollicité. Photo : Michel Brault.

On décélère

Le temps venu de décélérer, la dynamique change. Aussitôt que le pilote relâche la manette des gaz et que la vitesse du moteur diminue, la force exercée par les masselottes dans la poulie motrice est réduite, entraînant une séparation graduelle des assiettes. Le processus se poursuit jusqu’à ce que la pression générée par les masselottes devienne inférieure à celle du ressort, ouvrant les assiettes à leur maximum. Faisant marche arrière au processus décrit plus haut, la courroie, qui profite maintenant d'une plus petite circonférence à l'extrémité de la poulie motrice, cesse d'exercer une pression contre les assiettes de la poulie menée. Le ressort de cette dernière prend le dessus à son tour, forçant les deux assiettes ensemble. Et c’est ainsi que nous revenons au point de départ, alors que la circonférence dans la poulie motrice est à son minimum tandis que celle dans la poulie menée est à son maximum.

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Depuis de nombreuses années maintenant, il est possible d'acheter des masselottes permettant de peaufiner le placement du poids. Ce faisant, on peut modifier le fonctionnement de la poulie motrice afin d'obtenir les caractéristiques précises désirées. Par exemple, dans le cas des unités présentées ici, il existe trois emplacements où l’on peut rajouter (ou retirer) de la masse. En manipulant la position des pastilles de poids, il est possible de configurer deux masselottes qui ont exactement le même poids total, mais qui réaliseront un effet très différent dans le fonctionnement de la poulie motrice.

Ça se joue dans les détails

Les scénarios présentés ci-dessus sont plutôt simplistes, mais ils permettent tout de même de comprendre le fonctionnement de base du système en accélération et décélération. Nous pouvons maintenant commencer à nuancer le fonctionnement de la TVC en y ajoutant le fonctionnement et l'effet de certains composants qui sont parties intégrantes du système.

Commençons avec la poulie motrice. Comme nous l'avons mentionné précédemment, le rôle de celle-ci est de réagir à la vitesse du moteur. Vous ne serez donc pas surpris d'apprendre que le fonctionnement de la poulie motrice, soit la façon précise dont elle réagit aux changements de vitesse de moteur, peut être influencé par les caractéristiques de ses composants. Prenons les masselottes. Celles-ci ont un profil arqué (sur la surface en contact avec le rouleau) et la forme de cette arche, pour des raisons de géométrie, influe sur les caractéristiques de fermeture (et de réouverture) de la poulie. Il en va de même pour le poids de la masselotte. Dans les faits, la force exercée par celle-ci est le produit de la vitesse de rotation et du poids. À vitesse égale et de façon générale, plus la masselotte est lourde, plus elle exercera de force. En outre, au-delà de la masse totale de la masselotte, la façon dont celle-ci est distribuée joue aussi un rôle important. En effet,plus la masse est rapprochée du point de pivot, plus elle exercera son effet à basse vitesse.

L'inverse est aussi vrai et plus la masse est éloignée du pivot, plus elle aura un effet à haute vitesse. L'autre côté de l'équation dans la poulie motrice est le ressort. Il est important de noter que celui-ci est toujours installé en situation de précontrainte. En effet, son installation exige qu'il soit compressé de manière à ce qu'il exerce une force « au repos ». Tout comme c'est le cas lorsqu'on ajoute une précontrainte (ou précharge) à un ressort de suspension, ceci a pour effet de créer une sorte de barrière, faisant en sorte qu’aucun mouvement ne se produira tant et aussi longtemps que la force de cette précontrainte ne sera pas surmontée. Du point de vue fonction, c'est cette précontrainte qui servira à établir la vitesse-moteur nécessaire pour initier le déplacement de l'assiette mobile. Il va de soi que plus la force de précontrainte est élevée, plus le moteur devra révolutionner rapidement pour réussir à surmonter cette force.

L'autre caractéristique déterminante pour le ressort est la force qu'il exercera une fois complètement compressé (soit quand la poulie est complètement fermée, ou que les assiettes soient les plus rapprochées possibles). Selon la même logique sur laquelle repose la vitesse de démarrage, plus la force du ressort à pleine compression est élevée, plus le moteur devra révolutionner rapidement pour enfin réussir à compresser complètement le ressort. Il va de soi qu'un ressort avec une force finale plus basse permettra la fermeture de la poulie à une vitesse moindre. La poulie menée est aussi réglable selon le choix de composants.

Le premier parmi ceux-ci est le ressort. Comme c'est le cas avec celui utilisé dans la poulie motrice, le ressort joue un rôle clé dans le fonctionnement de la poulie menée, la force qu'il exerce étant déterminante dans la vitesse et la distance d'ouverture des assiettes.

L'autre élément clé de la calibration de la poulie menée est le hélix (ou la came). Rappelons que la fonction principale de la poulie menée est d'interpréter le couple ou la résistance offerte par la chenille. L’hélix, une série de rampes (généralement trois mais certains designs en ont deux), travaille avec le ressort pour gérer la transformation de la résistance en ouverture des assiettes. Les rampes sur l'hélix sont caractérisées par leur angle, exprimé en degrés. Defaçon générale, plus l'angle est petit (numériquement), plus il transmet de résistance à l’ouverture des assiettes et donc, plus il applique une force pour les refermer. Il s'ensuit que plus l'angle est grand, moins il transmet de résistance, ce qui fait s’ouvrir les assiettes plus rapidement, et donc, moins il applique de force pour les refermer. Du point de vue de la conduite, un hélix à grand angle chargera le moteur davantage en accélération (il montera à un rapport supérieur plus rapidement, si vous voulez) et réduira la vitesse du moteur à vitesse comparable. Il produira aussi des reprises moins nerveuses et « agrippera » la courroie moins fermement. L'inverse est vrai pour une came à angle plus petit, celleci réduisant la charge sur le moteur en accélération, haussant les révolutionsmoteur à vitesse comparable, livrant des reprises plus rapides et agrippant la courroie plus fermement.

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Il existe différentes configurations d’hélix selon les différents designs de poulies menées. Il est à noter aussi que l'angle des rampes n'est pas toujours constant. Par exemple, pour des applications visant à maximiser l'accélération, on fait souvent appel à des rampes ayant un plus grand angle au début (permettant de mieux charger le moteur) pour finir avec un angle plus petit (agrippant mieux la courroie à haute vitesse et réduisant ainsi le glissement qui nuirait à la vitesse de pointe).

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Si la TVC fait partie de l'industrie motoneige depuis pratiquement le tout début, les premières poulies motrices étaient plutôt limitées en termes de capacités et de potentiel de calibration. Tout cela changea quand Polaris introduisit une toute nouvelle poulie sur ses modèles TX 1970, celle-ci permettant de régler la vitesse d'engagement du moteur, ainsi que les caractéristiques de changement de rapport, changeant à jamais le monde de la motoneige. Cette innovation a ouvert la porte à l'utilisation de moteurs à calibration beaucoup plus pointue (et donc plus puissants). Aujourd'hui, toutes les poulies motrices des motoneiges, y compris la célèbre P85 de Polaris, sont des descendantes de cette grande innovation.

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Les ressorts de poulie motrices sont classifiés selon deux mesures (généralement exprimées en livres, ou lb), soit la force de précontrainte et celle à pleine compression. Par exemple, un ressort qui est caractérisé comme 130/290 exercera une force de 130 lb une fois installé et exigera 290 lb pour compresser complètement. Pour manipuler ces deux mesures, les fabricants jouent avec le taux du ressort ainsi que sa longueur libre, leur permettant d'obtenir les deux mesures désirées.

L'arrivée de la marche arrière électronique dans les moteurs à deux temps a transformé le choix de ressort dans les motoneiges qui en sont munies. Alors qu'anciennement, les ressorts dans la poulie menée fonctionnaient en compression et en torsion (comme ceux-ci), l'arrivée de la marche arrière faisant révolutionner les moteurs en sens inverse a mis fin à ceux-ci dans ces modèles. Par contre, ils sont encore utilisés dans divers modèles à quatre temps. Aujourd'hui, les motoneiges à deux temps utilisent plutôt des ressorts qui fonctionnement uniquement en compression (comme ceux dans la poulie motrice), ceux-ci diminuant l’effet d’ouverture de l’assiette mobile lorsqu’on utilise la marche arrière. Ce changement a aussi pour effet d’améliorer les reprises puisqu’il y a moins d’effet de relâchement de pression sur la courroie quand on décélère ou lors d’un saut. En contrepartie, cette configuration a tendance à hausser la température de la courroie, en plus de compliquer la calibration.

Quand la friction est l'ennemi

Bien qu'elle soit souhaitable lorsqu’Il s’agit de la relation entre la courroie et les assiettes des poulies, la friction ne l'est pas pratiquement partout ailleurs dans le système d'entraînement. Le fait est que sa présence nuit à la fluidité du fonctionnement et au temps de réaction des embrayages. Pour contrer le frottement dans les poulies menées, par exemple, on a remplacé les semelles glissantes (qui agissent sur les rampes de l'hélix) par des rouleaux sur la vaste majorité des motoneiges modernes. Le résultat est un temps de réaction nettement plus rapide, ce qui améliore particulièrement les reprises.

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Les ingénieurs de chez Ski-Doo ont porté une attention toute particulière à la réduction de la friction au moment de dessiner la poulie motrice pDrive fournie de série sur la majorité des motoneiges du fabricant pour l’année modèle 2019. Pour ce faire, on a remplacé les glissières traditionnelles (qui facilitent le déplacement de l'assiette mobile) par des rouleaux doubles et les coussinets utilisés à même les rouleaux ont cédé la place à des roulements à aiguille.

L'art des compromis

Il va sans dire que les exigences auxquelles sont soumises les motoneiges peuvent varier énormément, et non pas seulement en passant d’une catégorie à l’autre (comme, par exemple, d’un modèle utilitaire à un de montagne), mais aussi entre modèles identiques. Comme nous le savons, de nombreuses variables entrent en jeu, comme le poids du pilote, la température ambiante, l’altitude, le terrain, entre autres.

Il y a aussi la question des préférences des utilisateurs, certains préférant l’accélération en ligne droite alors que d’autres privilégient les reprises ou encore l’économie d’essence. Comment faire avec toutes ces différentes priorités qui sont souvent contradictoires ? Voilà justement le défi de taille que doivent relever tous les fabricants le moment venu d’élaborer une calibration pour chacun de ses modèles. Dans les faits, les calibrations que l’on retrouve dans les motoneiges qui nous sont livrées sont des réglages qui, selon les ingénieurs, reflètent le meilleur compromis possible compte tenu l’utilisation anticipée pour chaque modèle. Comme c’est le cas avec pratiquement tous les systèmes que l’on retrouve dans nos motoneiges modernes, les calibrations de série des embrayages d’aujourd’hui sont à des annéeslumière de ce qui était courant il n’y a pas si longtemps.

Malgré cela, il est possible d’optimiser la calibration selon ses besoins et préférences personnels, soit en optimisant le tout selon des facteurs plus restreints. Il faut, toutefois, demeurer réaliste, sachant qu’aucune combinaison ne pourra répondre aux exigences dans toutes les conditions. Si vous souhaitez vous procurer un des nombreux « kits de clutch » offerts sur le marché, il est important de s’informer des objectifs qui ont guidé son développement afin de s’assurer que ce que vous achetez soit fidèle à ce que vous cherchez. Autant il est possible d’améliorer le rendement des réglages de série, autant un kit conçu à des fins complètement différentes des vôtres peut vous éloigner de votre cible.

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La distance entre les poulies, ou plutôt son maintien, est un élément clé dans le fonctionnement d’un système TVC. Pour maintenir une distance la plus constante possible, Arctic Cat a conçu son célèbre Arctic Drive System (ADS). Celui-ci fait appel à une tige (appelée Torque Control Link) qui relie le système d’entraînement du moteur au bras de transfert. Ce système est utilisé sur les modèles 6000 et 8000.

Trucs et astuces

Mis à part la calibration, des éléments jouent un rôle important dans l'opération de la TVC. Pour commencer, l'alignement des poulies joue un rôle crucial. Une poulie désalignée d'à peine quelques millimètres peut non seulement compromettre le fonctionnement et l'efficacité du système d'entraînement, mais peut aussi nuire à la longévité de la courroie et des autres composants. Il va de soi qu’un bon alignement contribuera à accroître la performance, diminuer la consommation et prolonger la vie des courroies et composants. Notez que les instructions concernant l’alignement varient d’un fabricant à l’autre, voire d’un modèle à l’autre.

Nous vous conseillons donc de consulter votre concessionnaire (ou de vous procurer un manuel d’entretien) afin d’obtenir les informations nécessaires. Il est important aussi de maintenir la courroie bien ajustée, soit en réglant la flèche. Pour ce faire, on ajuste la séparation des assiettes dans la poulie menée de sorte à atteindre la flèche précisée par le fabricant. Si celle-ci n’est pas bien réglée, le système fonctionnera de façon sous-optimale, notamment à basse vitesse. Par exemple, si la flèche est excessive, cela fera en sorte qu'au moment du démarrage, la courroie sera placée à la fois plus haute dans la poulie motrice et plus basse dans la poulie menée, ce qui aura pour effet de réduire la démultiplication.

Autrement dit, on aura l'impression que la motoneige démarre en deuxième ou troisième vitesse (pour utiliser une analogie d'automobile à boîte de vitesse manuelle). Par ailleurs, si la flèche est insuffisante, la courroie peut exercer une pression excessive sur la poulie motrice, entraînant entre autres un déplacement de la motoneige ou une usure prématurée de la courroie. La propreté est aussi importante, un nettoyage et un entretien réguliers aidant à assurer un fonctionnement optimal, tant de la poulie motrice que de la poulie menée. Un nettoyage par air comprimé peut aider à chasser la poussière et autres impuretés, réduisant l’usure et améliorant le rendement. L’état des assiettes est aussi un élément important. Une pratique simple, mais qui peut se révéler utile et efficace pour réduire le glissement de la courroie, est de nettoyer périodiquement la surface des soucoupes à l’aide d’un tampon abrasif (ex.: Scotch-Brite) avant de l’essuyer avec un linge imbibé d’acétone. Il est également important de vérifier l’état de la courroie, car une courroie usée réduit de façon importante l’efficacité du système. Le temps venu de la remplacer, il est suggéré de nettoyer la nouvelle courroie au préalable avec du savon et de l’eau tiède, ce qui aide à retirer le composé utilisé lors de la fabrication et du coupage. Ce faisant, les assiettes restent plus propres et adhérentes.

L'effet de la courbe de puissance

Chaque moteur a une plage de puissance qui lui est propre, celle-ci étant le produit de nombreux facteurs, notamment sa calibration, ainsi que son type (soit à deux ou à quatre temps). Du côté de la calibration, plus un moteur (à deux ou à quatre temps) est calibré pour livrer un rendement spécifique (soit la puissance relative à la cylindrée, généralement exprimée en ch/L) élevé, plus sa courbe de puissance sera pointue.

Autrement dit, plus la puissance à haut régime sera favorisée au détriment de la puissance à bas régime. Quant au type de moteur, les moteurs à quatre temps ont généralement des plages de puissance plus linéaires et égales que celles des moteurs à deux temps. À ce chapitre, les deux types de moteur se différencient aussi sur le plan des vitesses de pointe pour les lectures maximales de couple et de puissance. De façon concrète, l’écart entre le couple et la puissance ultimes d’un moteur à deux temps joue généralement entre 100 à 400 tr/min, alors que dans le cas d’un moteur à quatre temps, l’écart est nettement plus grand, pouvant aller de 1000 à 2000 tr/min!

Alors, compte tenu de ces infos, comment les ingénieurs chargés de calibrer les embrayages adaptent-ils leurs réglages ? Selon Gilles Gagné, propriétaire du concessionnaire Gagné-Lessard Sports à Coaticook et de l’atelier de performance G-Force Division, les masselottes utilisées dans les moteurs à deux temps ont un profil (ou une arche) plus courbé que celles que l’on retrouve dans les moteurs à quatre temps. La raison est que dans le cas du deux temps, celui-ci étant généralement de calibration plus pointue (et donc relativement moins puissant à bas régime), il est préférable que le moteur puisse grimper rapidement en révolutions pour se rendre dans la plage de vitesse où il est plus performant, ce que l’arche lui permet justement d’accomplir. Dans le cas du moteur à quatre temps, son efficacité à bas régime fait en sorte qu’on utilise des masselottes à profil plus linéaires, permettant de mieux charger ce dernier et ainsi profiter de sa large plage de couple. Gagné nota que ces profils distincts sont aussi utiles à l’autre bout de la plage de vitesse, soit à haut régime. Dans le cas du moteur à deux temps, une hausse subite de la charge – réalisée, par exemple, en quittant le sentier pour la neige poudreuse – taxe le moteur davantage, occasionnant une perte de vitesse au niveau du moteur.

Si cela peut sembler négatif à première vue, la réalité est tout autre, ce changement de vitesse transportant le moteur à son couple maximal, la où il exerce le plus de force. Les choses sont différentes pour le moteur à cames, ce rehaussement de la charge cherchant à faire caler le moteur qui, lui, est loin de son couple maximal. Le truc est donc de tenter de maintenir la vitesse du moteur à son même niveau, ce que permet d’accomplir le profil plus linéaire de la rampe.

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Notre expert note que l’arrivée des moteurs turbocompressés a compliqué les choses davantage compte tenu des complexités de fonctionnement supplémentaires qu’ils apportent. Par exemple, à vitesse-moteur égale, un moteur turbo, selon la charge qu’on lui applique (et qui influe sur la pression d’admission), peut voir sa puissance grimper de quelques dizaines de ch. La force exercée par la masselotte, elle, est statique, établie en fonction de la vitesse de révolution et rien de plus. Disons que de tenter de calibrer un tel système n’est pas pour les petites natures…

Arctic Cat, de par son fournisseur d'embrayages TEAM Industries, a développé la poulie motrice Rapid Response II qui règle l’enjeu d'ajustement de la courroie. Pour ce faire, on ajoute un roulement à rouleaux sur l’arbre principal (flèche rouge), ce qui fait en sorte que la courroie puisse reposer sur la manche de l’arbre et rester immobile grâce à la présence du roulement. Ce design a permis d’éliminer l’ajusteur de flèche que l’on retrouve ordinairement sur la poulie menée.

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